Chronique : Stacy

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author = "Miles Davos"
title = "Stacy"
date = "2024-08-24"
tags = [
"bd","critique","chronique","thriller","société"
]
ISBN = [
"9782754845649"
]
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Gianni, écrivain, de gauche, a du mal à vivre de son art malgré son succès, destime.
Que faire ? Écrire des scénarios, comme tant dautres artistes, en espérant quils trouvent grâce aux yeux de Netflix.
Le voici appelé à rejoindre une équipe se constituant dans ce but précis.
Certes, on attend de lui créativité et originalité, mais contraintes. Par le formatage. Par lair du temps. Et un impératif : ne pas (trop) bousculer le public et sa sensibilité par des saillies incontrôlées, des sorties de route qui déchaîneraient cris dorfraie et philippiques sur les réseaux sociaux. Car, comme chacun le sait, peu importe le fond tant quon évite le bad buzz telle la peste bubonique.
Tout débute sous les meilleurs auspices jusquà ce que Gianni dise trois pauvres mots, oui, trois, qui lui feront vivre lenfer et une longue traversée du désert.
Trois pauvres mots qui vont susciter lire de ses congénères et dartistes condamnant ouvertement ses propos. Ses prétendus amis, soi-disant ouverts et tolérants, le renient et vont même jusquà le lyncher par leurs microposts et autres pensées pressées et compressées.
Gianni, le pestiféré, est atteint de ce qui semble être un trouble de la personnalité, à moins quil nait un peu trop incorporé des traits desprits tordus — des tueurs en série — quil dut étudier en profondeur pour les besoins de son travail. Il rumine, se met à rêver de vengeance sans passer à lacte. Il prend son mal en patience, tente de sexpliquer — sans succès.
Des mois sécoulent. Et voilà quune seconde chance lui est offerte. Il réintègre son équipe, au plus bas de léchelle. Ayant appris de son erreur, il met un masque. Comme les autres. Il pèse ses mots, lisse sa langue, soigne son image et lego de ses prétendus amis.
Il réussit à faire oublier ses pauvres mots et à regagner la confiance de ses collègues. Cependant, son trouble saccentue, aidé en cela par Démon, un homme dont on sait si peu au début, à part que de probité il nest guère doté.
Désormais pleinement réintégré dans son milieu ouaté dintellectuels hors sol, Gianni passera-t-il outre les quolibets et lopprobre dont il fit injustement lobjet ?
![](/images/stacy.jpeg)
Gipi réalise avec « Stacy », son dernier roman graphique, un tour de force, rajoutant ainsi une importante pierre à lédifice du 9e art. Une pierre qui parle merveilleusement bien de notre époque, de ses excès, des tensions qui la, qui nous parcourent. De nos doutes, de nos peurs, de nos trahisons, de notre médiocrité.
Ses personnages sont particulièrement recherchés. La plongée quil nous offre dans la psyché de Gianni est un vrai bijou narratif. Les pistes quil ouvre, ici et là, montrent un profond respect pour limagination de ses lecteurs. Excellent thriller psychologique à tiroirs, « Stacy » la fait travailler comme il se doit, contrairement à une série Netflix qui, telle la malbouffe, consisterait en un fricot pour lequel nous naurions besoin ni de mordant ni de chicot pour la digérer.
[Stacy](https://www.futuropolis.fr/9782754845649/stacy.html). Gipi. Futuropolis. 25€.

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